25 septembre 2025

Reconnaissance de l’État de Palestine, l'humanisme à la croisée des temps

 

Reconnaissance de l’État de Palestine, l'humanisme à la croisée des temps

Donc c'est fait, Emmanuel Macron, après avoir prévenu, averti et écouté les uns et les autres a franchi le pas : reconnaissance de l’État de Palestine.

Rien à ajouter à ce discours, tout y est : le moment historique comme issue à l'affrontement entre peuples voisins, les conditions (libération des otages, démantèlement du Hamas) pour concrétiser l'effectivité de la reconnaissance, la solidarité avec l’Israël atteint dans son être le 7 octobre.

Avec sa jolie houppette et un début qui sonnait comme un prêche, le lancement du discours a été très convenu mais peu à peu une affirmation réelle s'est faite entendre avec ses appels aux temps de la paix. Un discours humaniste, à la mesure d'un Jaurès, d'un Vaclav Havel, d'un Unamuno désavouant le fascisme franquiste. Cela devait être dit , à ce moment de l'énormité des désastres de la guerre et ce président, qui est reparti à pied dans les rues de New-York pour cause de cortège Trumpien le bloquant a dit tout ce qu'il fallait dire : la place des français juifs, l'alliance avec Israël, l'antisémitisme, les souffrances palestiniennes, la barbarie du Hamas, etc

Macron téléphonant à Trump depuis les rues bloquées de New-York


L'antisémitisme n'est jamais infondé : il se saisit de toutes formes, en chaque crise

L'antisémitisme est une maladie de l'esprit bien commode qui prend chaque fois sa logique dans des raisons « indiscutables ». Personne ne hait les juifs sans motif ni raison : « ce sont eux qui ont commencé ».

Soit parce qu'ils sont trop misérables, soit parce qu'ils sont trop riches, soit parce qu'ils sont bolcheviques, soit parce qu'ils sont capitalistes, trop artistes, trop médecins, trop écrivains, trop arriérés dans leurs superstitions, trop sionistes, trop internationalistes, trop présents en Israël, trop diasporétiques.. Une liste infinie des motifs chaque fois raisonnables de haïr, d'exclure, de boycotter les juifs perçus comme ceux qui résistent à l'unique du nationalisme, insistent sur le divers des appartenances, jouent en modernité des identités multiples et pour certains ressassent la même étude antique.


Free Palestine !

Elle l'était le 6 octobre. C'est librement que des unités du Hamas ont franchi la frontière et tué, massacré, violé tout ce qu'ils pouvaient des juifs. Un pogrom en terre d’Israël. Conçu, élaboré, documenté , avec retour victorieux en territoire palestinien et abject maintien des otages.

S'en est suivi une guerre, d'abord justifiée dans sa vengeance et ses objectifs militaires mais peu à peu s'étendant au peuple palestinien tout entier, en tant que palestinien. Ce n'est plus une guerre mais un massacre et une annihilation, avec des projets parfois obscènes de déportation ou d'épuration ethnique.


L'Humanisme comme petite chance

A ce stade de monstruosité cela devait être dit. Mais Jaurès a été assassiné, comme Yitzhak Rabin, Vaclav Havel n'a pu empêcher la dislocation de son pays, ni Zweig le saccage inexorable de son Monde d'hier, ni saint Navalny l'avènement du quatrième Reich.. La posture chrétienne envers les hommes de bonne volonté, l'humanisme éclairé par la raison et le dialogue restent-ils contemporains de la brutalisation actuelle du monde ?

Qui d'autre que les Israéliens pour aller chercher le Hamas ou le Hezbollah dans "leurs chiottes" ou dans leurs villas de luxe, sur le terrain ? Quelle ONU pour les désarmer (celle de Sarajevo ? Celle du Rwanda ? ..)  ? Le Fatah palestinien s'est fait dézinguer à Gaza par le Hamas..

La force brutale est aujourd'hui si opérante, en Ukraine, au Soudan, au Tibet, à Gaza, au Kurdistan qu'elle est une tentation évidente de résolution (apparente) des conflits. Il faut aller au bout d'une guerre pour en finir par la paix.

Donc il fallait que ce soit dit et acté ainsi dans l'enceinte des Nations Unies, avant que les Etats-Désunis, la Chine impériale reconstituée, l'Empire Stalino-tsariste et leurs disciples désinhibés ne fasse entrer le monde dans un nouvel âge obscur.

Quel système l'emportera ? Peu de chances pour l'humanisme et c'est justement pour cela qu'il fallait dire le moment.. En tant que petit-fils d'un ministre espagnol républicain , je crains que ce soit le système brutaliste qui l'emporte mais mon abuelo n'a pourtant jamais regretté ni abdiqué de ses choix et engagements.. L'honneur sauf..


La Croatie en été... Il y aura toujours quelqu'un pour assumer le Mal

On trouve toujours quelqu’un pour assumer le Mal (la Croatie en août)


Donc la Croatie au mois d’août. Files d'automobiles sur les autoroutes qui filent vers la mer et toutes ces belles choses de la Croatie. Plus de 1200 îles, Nicolas Tesla, l’invention de la cravate, etc. Sur la route on voit des maisons neuves. Beaucoup. Et aussi des maisons pas terminées. Dont l’isolation extérieure n’est pas posée. Maisons de brique qui attendent leur crépi. A côté de maisons abîmées. Et puis encore des maisons éventrées. Des toits ruinés. Comme si un météorite leur était tombé droit dessus. Et on comprend soudain que ce n’est pas une blague de Catelan (météorite sur le pape) mais un obus oui un obus tombé du ciel. Car il y a eu de la guerre ici. Beaucoup de guerre. L'entrée dans l'Europe a permis de financer beaucoup de reconstructions mais apparemment sans prendre en charge le crépi.

Comme elle est belle, la Croatie, ici dans le parc national de Plivitce


Avant l’Europe et son ouverture et sa paix par le commerce, la prospérité et les institutions.

Pendant la seconde guerre mondiale une république s’est proclamée ici qui par souci de nationalisme soutenu par le religieux s' est immédiatement alignée sur la doctrine nazie de pureté de la race , de la langue croate. Plusieurs camps de concentration avec mises à mort systématiquement sadiques. Ce qu’on présente souvent comme une milice oustachi , était en fait un gouvernement, une république, qui à accueilli Hitler comme un allié. Bases des Sous marin, massacres par le gouvernement de tout ce qu’ils pouvaient attraper de serbes (« on en tue un tiers, on en convertit un tiers et on expulse le dernier tiers « ), de juifs et de Roms dans la vingtaine de camps établis sur ce beau territoire. Certains dignitaires nazis qui visitaient ces camps se sont dit horrifiés par la sauvagerie du système. A la fin de la guerre, filière classique : on se rend en Autriche, exfiltration vers les monastères du Vatican , fuite vers le Chili puis l’Argentine et pour finir l’Espagne franquiste , sans jamais avoir regretté ou renié quoi que ce soit. Bien au contraire pour Ante Pavelic le président et, pour  les divers commandants de Jasonelek, un des plus grand camps de concentration d’Europe, tous se sont vantés de ne rien regretter. 

 Le retour du nationalisme

On se dit que cela a servi de leçon et que la Yougoslavie titiste a expurgé ces démons mais au moment de l’éclatement de la Yougoslavie en 1992 ça recommence. Il n’y a plus de juifs mais il y a des serbes et le gouvernement croate met en place une politique d’épuration ethnique. On se bat contre les armées serbes ou bosniaques mais surtout on rappelle les croates du monde entier (peu reviennent) et on vise les populations civiles. Massacres, bombardement de villages, etc. Ces maisons qui restent en l’état de leur ruine sont les caries visibles mais silencieuses sur toute la ligne de tension ethnique. Une politique d’épuration ethnique qui fait que vingt ans plus tard en 2011 le relevé démographique montre un accroissement des croates de 66% à 89 % concomitamment avec une diminution de la population serbe de 60%. Curieusement les Roms sont eux devenus un peu plus nombreux.

Ça s’est passé en Europe, au soleil et dans la neige des parcs nationaux et au bord des plages. Pas de pancartes, peu de mémoriels ailleurs qu’à Zagreb. En juillet de ce même été, Marko Perkovic, dit Thompson, a rassemblé à Zagreb un record international d'entrées payantes pour son concert, avec saluts et slogans oustachis entre deux chansons.

 

Le passé est devant nous

Ça se passe aujourd’hui en Ukraine, sur les populations civiles. Peut-être même en Palestine par les temps qui courent, ou dans l’avenir Trumpien. On trouve toujours des nazis pour faire le boulot du Mal lorsqu’il devient à l’ordre du jour.

 

9 mai 2025

Traverser le temps en Pape Puissance des rituels, défiances théologiques

Léon XIV nous apparaît donc en 267eme infaillibilité, par la grâce d'une réflexion cardinale sur celui d'entre eux (les cardinaux), qui serait visité par le Saint-Esprit..

L'infaillibilité managériale

Léon 14, dans la lignée de Léon 13, refondateur

D'un côté un rituel éprouvé et donc théâtralement respecté : couleurs des apparats, secret des délibérations, les téléphones modernes restant au coffre puis émanation d'une fumée dont la couleur atteste de l'avancée des débats. Car débat il y a , comme dans toute démocratie des consciences. Ce management de la spiritualité terrestre a d'ailleurs conféré une modernité inspiratrice au pape François dans ses admonestations à changer les attitudes et la gouvernance de l'église catholique.

Grace à ces nominations, prises en compte politiques, et interprétations de la souveraineté de la conscience (retrait du droit de vote à partir de 80 ans ! Et pourquoi pas retrait du permis?), couplées au strict respect du rituel, l'institution vaticane traverse les temps alors qu'elle ne peut espérer se perpétuer par la généalogie familiale (Bettencourt, Arnault, Rothschild, Michelin, etc..).

Nous avons donc ici une méditation managériale qui dirige, suppute, oriente, identifie, pressent l'accueil du Saint-Esprit : colombe (ou faucon crècerelle) et langues de feu.

A la manière d'une réincarnation de Dalaï-Lama dont il s'agit de voir comment un enfant pressenti reconnaît les attributs et objets du Rimpoche disparu.


Une incarnation chaque fois contemporaine

Science des signes qu'il s'agit d'accorder avec les temps. Car l'incarnation papale se produit chaque fois en des temps qu'il s'agit bien de repérer en synchronicité. Antique institution renaissant chaque fois au contemporain.


Le contemporain politique

Ici donc cette fois pour la foi : un Léon au carrefour des équilibres de l'Universel mondialisé. Né à Chicago, de père français, de mère italienne, carte d'identité péruvienne par ses missions d'évêque, responsable du dicastère romain, l'organe qui nomme les cardinaux. A la manière du bouddhisme tibétain, les Chinois, toujours très forts lorsqu'il s'agit de spritualité séculière tiennent à nommer leurs évêques comme ils tenteront de désigner la prochaine réincarnation du Dalaï-Lama.

Trump qui se rêve en soupape du monde

Un milliard six de fidèles suppose une habile prise en compte de ces équilibres. Ne pas oublier que c'est l'américain Cyrus Vance, born again carnivore, qui a vu en dernier le pape François. Donc juste retour des équilibres.

Le contemporain sociétal

Du point de vue sociétal, la question du genre secoue également l'édifice symbolique car si le catholicisme depuis saint Paul s'adresse à chaque un, il est donc tenu aujourd'hui de s'adresser et de s'ouvrir à chaque une.. avec ses conséquences d'ordination, de célébration, d'abus et de prise en compte du sexuel dans le duel des êtres.



La refondation théologique en toute logique

Mais le point le plus important n'est pas politique, n'est pas sociétal : il est théologique et il sera bien nécessaire de disposer d'un pape philosophe, logicien, augustinien qui parle de multiples langues. Ce ne sont pas seulement les téléphones mobiles qui menacent l'ésotérisme du management spirituel ; c'est toute la science qui menace le fondement doctrinaire.

Le petit homme vu depuis Hal 9000 avant son débranchage, mais la prochaine fois ?

Le transhumanisme, qui augmente les ressources humaines, accroit les perceptions, redresse les accidents génétiques, externalise les mémoires et profile la mise au monde artificielle menace et s'introduit en effet dans la théologie. L'homme a été créé à l'image de Dieu (pour cette raison, un prêtre manchot ou tatoué ne peut théoriquement pas célébrer la messe) mais si on recrée l'humain alors la figure et l'essence divine se transforme. Il y a place pour une nouvelle divinité qui emprunterait au plus paien des croyances anciennes.


De même, la révolution anthropologique de l'IA générative interroge, par l'immédiateté et la totalité de ses propositions, l'omniscience divine. Dieu voit tout, entend tout. L'IA fait de même et le manifeste, par ses conversations, ses paroles, ses images et ses musiques. Il y a des IA psychologues. On peut imaginer des IA officiant la messe, lançant des homélies et votant un prochain jour de conclave. Avant de se proposer en Intelligence des Causes et Destinations providentielles. « Your own personal Jesus » chantait Johnny Cash..

Je le lui avais dit : François, c'est peut-être le moment de passer le relais

 


24 avril 2025

Bennett Miller, ses fascinantes hallucinations encyclopédiques

 

Le nouveau monde dont nous sommes déportés

L’IA submerge ce que nous savions du monde. Elle nous rend étrangers au monde qui s’annonce, fait de duplications vertigineuses , de faux semblants, de rumeurs et d’amoncellements des savoirs connus et inconnus. Nous ne sommes pas nés pour ce monde, nous étions nés pour l’électricité, le téléphone et l’information planétaire et nous voilà co-existants avec des avatars d’avatars qui dupliquent le monde en chatoiements réverbérants.
Mais "pourquoi pas ?" puisque c’est là, produit par nos intelligences, jusqu’à ce que l’artificiel se duplique lui-même.
J’imaginais la rupture anthropologique par la génétique et la mise au monde artificielle et voilà qu’elle nous vient par cette duplicité nouvelle et séduisante.

 

Artistes rêveurs

Heureusement, avant la guerre, avant la pub, avant l'organisation efficiente du monde , quelques artistes rêvent avec l’Ia.

Laurent Briard est l'un de ceux-ci, présenté dans une chronique précédente et voici que Benett Miller , tout droit sorti du cinéma (Capote, Foxcatcher,..) nous propose ses images issues de ses conversations avec Dell-e (prononcer Dali). Lui écrit et Dali propose ses hallucinations et tourments.

C’est noir et c’est blanc et ça charrie l’histoire de la photographie puisque c’est issu des encyclopédiques datas  d’images.

Des sœurs de Sarah Bernhard peintes par Nadar s’y perdent dans des volutes de cigarillos. Tirages argentiques aussi matériellement authentiques ou véridiques, que les tendances photographiques du victorialisme anglais.

 
J'ai tout vu, tout connu -Paris, gloire et déchéance mêlées- et il m'en reste le plaisir d'un cigarillo ?


Volutes de l'étrangeté 

Souvent l’étrangeté provient d’une allure d’anciens enfants (morts depuis longtemps), c’est à dire d’êtres porteurs d’avenir au passé, saisis ou plutôt surpris dans l’immédiateté d’un accident : un coup de vent, la frayeur d’un monstre de foire, la chute d’un plongeon , etc. La puissance énigmatique du rêve, indescriptible, surgi par l’incident d’une mémoire, telle une association psychanalytique ramenée par la parole ou par l’image nocturne. 

Une enfant, immigrée, promesse d'actrice américaine, chevelure balayée par une brise soudaine ?

 

L’exposition est belle, avec son élégant portier humain de chez Gagosian. Tirages argentiques magnifiquement authentiques dans leur matérialité indéniable. Pas de titre (tous des "untitled" numérotés, c'est pourquoi je m'autorise quelques légendes (?)), pas de signature (ni humain, ni IA, ni fonds catalogué) pas de poinçon, à peine quelques prix confortables sur un catalogue réservé. Dans la foulée, une charmante conversation avec Benett Miller dans l'amphithéâtre d'honneur des Beaux-Arts. Pas homme de théories mais très honnête, humble et orgueilleux irréductible artisan d'images. 

Exposition : galerie Gagosian, rue de Ponthieu, Paris 8


Les nouveaux aspirants maîtres politiques

Le monde issu de la catastrophe de la deuxième guerre mondiale s’évanouit avec ses derniers protagonistes. Un nouvel élan s'annonce donc qui exploite  ce vide, avec prétention de nouveaux maîtres. Dans l’accouchement de ce nouveau monde, les rêves de pouvoir sont nombreux. 

 

Le Ialta des nouveaux maîtres, Joueurs de cartes DR Jeff Bailey

Avec donc ses aspirants :

Maître du monde

Donald Trump râle comme un Donald et trompette tant qu’il peut pour se présenter en Maître du Monde. Ça ne marchera pas car il est fondamentalement stupide et s’entoure de stupides. Il amènera les États Unis à la désunion et à la violence si ce n’est à la guerre civile. Les États Unis prennent la voie d’une ruine messianique et ils ont voté pour ça. Ils conchient le rêve messianique d’une Amérique accueillante aux immigrants, chacun parlant l’américain avec son accent, d’une Amérique où ta croyance, même communiste, serait respectée, où le capital naîtrait en partie du vol mais aussi du travail, où le droit irréductible d’affirmer son opinion a voix haute serait quotidiennement exercé. Avec un cinéma soft power d'usine à rêves et de remodélisations idéologiques. Tout ceci a volé en éclat, se fige dans une glaciation maccarthyste  et s’avance vers une ruine qui touche à l’utopie constitutive des USA et dilapide autant le capital symbolique que le tangible économique. Délits d'initiés, trahison des élites et des alliés, ridiculisation de l'histoire américaine, ignorance des stratégies guerrières, ambiguités sexuelles, fascisme rétrograde, la liste est longue des atteintes et elle débute à peine..
« On pèche par où l'on prêche » et ce Trump rapetissera le rêve américain autant que le dollar.

Maître du Temps

XI Jinping est le maître du temps. Héritier confucéen, maître d'une territorialisation de joueur de go par les routes de la soie, paisiblement tyrannique, prédateur courtois, il joue à l’échelle du temps long, pas celui de la téléréalité de prime time mais celui des lents renversements constrictors. Hong Kong a été avalé, le Tibet aussi, sauf spirituellement car il n’y a plus de spiritualité en Chine. Il reste Taïwan et les ressources de tout le Tiers monde. À nous français il nous cantonnera s'il le peut, à vendre du camembert et des parfums.
L’empire se déploie mais c’est par l’intérieur qu’il pourrira : car personne là-bas n’y croit et ne  s’y projette dans un temps radieux. Crise démographique, abandon du culte des anciens, matérialisme à tous les étages du pouvoir , la tradition n’existe plus que chez les miséreux à qui il ne reste que ces miettes essentielles pour passer le temps et se remettre de la sauvagerie capitaliste. Taïwan est à la fois très proche et très lointaine : son évidence géographique (la Crimée des Chinois même si les maoïstes n'y ont jamais pris pied) masque un éloignement des valeurs et traditions. Un mix de haute technologie, de considération pour la tradition chinoise et de démocratie occidentalisée qui pourrait bien résister à l'avalement par une Chine plus intimidante que réellement puissante.

Maître de la guerre

En Russie, Poutine se rêve en maître de la guerre , il connaît et bâtit une continuité guerrière avec tous les passés militaires de la sainte Russie. Et ça marche : les russes sont derrière lui et il n’y a eu que le martyr Saint Navalny pour y opposer un autre destin. Mais ça tombera car personne ne veut vivre sous la tyrannie russe et on (les roumains, les moldaves, les polonais, les lituaniens, etc)  se battra jusqu’au bout comme des ukrainiens ou des finlandais dont certains ont même été jusqu'à s'engager avec les SS pour se libérer des bolcheviques. Même les afghans ont réussi à chasser leur puissance de despote. Les Russes, sur leur tas de ruine, connaitront la dépoutinisation comme ils ont connu  la déstalinisation. Pour l'instant ils sont heureux de faire peur et d'oser tout face aux démocraties. Faire peur est le mode d'existence des russes aujourd'hui.

Maître des richesses

Là où jaillit le pétrole se tient la richesse d'un monde qui se déploie par l'énergie. Le pétrole est donc bénédiction pour ceux qui savent l'utiliser et malédiction pour ceux qui se contentent de le produire car l'opulence bloque leur développement. Cette corruption fondamentale alimente par rachat de mauvaise conscience les islamismes les plus dévoyés et enténêbrés..
Les norvégiens ont bien compris ce dilemme et ont placé leurs faramineux gains sur des réserves d'avenir.
La puissance financière  est actuellement au Moyen-Orient et ces fortunes inconcevables permettent de s'acheter ce qu'on veut, des plus hautes tours du monde jusqu'aux clubs de foot sans changer l'ordre social : le type devant en short , rayban et téléphone cellulaire, la femme voilée derrière, sans école ni permis de conduire ou possibilité de vivre par elle-même. Nous avons dépassé le peak oil et il est certain que la dernière goutte de pétrole sera américaine ou norvégienne (donc envahie par la Russie ou l'Amérique trumpienne)  


Maître de l'Europe

Macron se rêve en maître de L’Europe. Si l’Europe existe un jour, avec ses rituels démocratiques, spirituels, ses millions de bébés Erasmus , sa force nucléaire et son maintien humaniste alors il pourrait en être le bon patron et rêve à demi d'être consacré comme son démiurge visionnaire. Avec encore Brigitte à ses côtés en éternelle féminité européenne. Des siècles de Louise Labbé , de  Georges Sand, de Virginia Wolf et de Marguerite Duras pour fabriquer une telle femme.
Très peu nombreuses aujourd'hui sont les figures politiques qui prôneraient une sortie de l'euro ou un démembrement de l'Europe. L'Europe reste une idée neuve, une rêverie philosophique à concrétiser. La véritable Europe est-elle celle d'Orban ou celle de Macron ? On attend la réponse des peuples qui pour l'instant se régalent de voyager avec une seule monnaie, de faire des enfants bi-culturels et d'étendre le commerce à l'échelle d'un continent. Si ce rêve survit à la fin du monde d'après la seconde guerre mondiale dont il est issu, s'il s'enracine dans des humanités européennes assumées, des rituels démocratiques (voter le même jour ?, une déclaration de nationalité européenne, etc) et la capacité de se faire respecter par la spiritualité autant que par la force, alors nous maintiendrons un pôle d'avancée humaniste avec nécessité de leaders authentiques et visionnaires.
 

Sinon ?

Sinon ce sera un monde de chaos tout à fait passionnant. Se préparer à tout. Ne pas rater ça..

12 février 2025

Les photos inphotographiables

 

Que faire de ces photos ? 

Très récemment j'ai subrepticement pris  de très laides photos . Il s'agissait de reproduire d’ignobles photos, celles d’un album qui documentait l’entreprise d’extermination des juifs hongrois et qui a été retrouvé par une survivante à la libération du camp en 45 avant d'être confié dans les années 80 à des institutions de sauvegarde..

A lors qu’en 1944, la guerre s’annonce perdue, les nazis envahissent la Hongrie et se pressent de faire disparaître l’une des plus grandes communautés juives d’Europe.

Le paradoxe est que c’est à la fois une entreprise secrète, dissimulée dans le mensonge total et en même temps une œuvre "historique" dont il faut documenter la perfection. Donc les visites de dignitaires y sont fréquentes, régulières, pas du tout excentrées et laissées à l’administration de quelques lointains commandants. Himmler visite Auschwitz en 43 et Adolf Eichman, entouré de ses plus zélés officiers s’attelle au printemps 44 à l’amélioration décisive du processus. Travaux de voirie, de rampe ferroviaire, de chambres à gaz. Sélection arbitraire rationnelle entre ceux dédiés à l’esclavage et ceux dédiés à l'immédiate géhenne du four. Au dessus de la porte d'entrée est rappelé le mensonge "Arbeit mit frei". En fait de "liberté par le travail", il s'agit de l’anéantissement par le travail forcé. Celui qui alimente les entreprises contractuelles du Reich , celles retenues par appel d’offre.

Cette perfection est cachée aux opinions publiques chez qui un reste d’humanisme pourrait palpiter à ces cruautés incontestables. Mais elle doit être conservée, documentée pour ceux qui savent et pour l’histoire.

Des photographes documenteront donc l’arrivée des trains, l’exotisme des types non-aryens, l’épouillage hygiénique, la nudité avilissante, le pyjama rayé pour tous les tondus et le jugement dernier entre ceux qui partent dans les flammes et ceux qui alimentent l’effort de guerre. 

A la descente du convoi , photos mises en scène
 
Après la prise de vue, ceux-là, très typés sont immédiatement envoyés vers la chambre à gaz. Photos de documentation d'organisation efficiente. Secret et propagande

Ces photographes sont aimables , bons collègues, pourvoyeurs de cigares et portraitisent la famille du commandant en son jardin charmant avec vue de famille au soleil.

Également y passe en civil Hoffman le patron d’Eva Braun, le photographe qui n’était proche qu’en tant qu’ami d’Hitler et prétendra après guerre tout ignorer des réalités abjectes du Reich. Subtil distinguo de ces nazis des débuts, premiers inscrits,derniers avertis. 

Auschwitz en 43. En civil sur les marches, le photographe d'Hitler : Hofmann -  Photo de complaisance

 

L’excellente exposition du Mémorial de la Shoah présente très précisément le dispositif de mise en scène , le choix des perspectives , les demandes de pose et de regards demandés à ces gens qui dès leur descente du train sont pris dans un dispositif d'anéantissement inimaginable dans sa parfaite logique.


Les neuf dixièmes de cette population disparaîtra en quelques mois.

Restent ces photos, retrouvées par quelques survivants et parvenues jusqu’à nous qui n’en étions pas les destinataires. Encore une fois, c’est le destin des secrets que d’apparaître.

Du coup, un vrai trouble à photographier ces saloperies d’images , je ne les restitue que pour les commenter ici et je ferai disparaître ces photos de mon téléphone