20 décembre 2017

Le théâtre nucléaire

« Le grand trou, une tragédie antique du futur » par Le Théâtre de la Démesure ou « Quel théâtre laisserons-nous à nos enfants ? » *
Ah dirons-nous assez l'avance des artistes sur la pensée ?
Schnitzler sur Freud ?
Heiner Müller sur Gorbatchev ?
Gheorgiu sur l'Europe ?
Lucrèce sur Oppenheimer ?

Le temps du radioactif 

Le nucléaire traite formidablement de l'atome mais la durée de ce traitement excède ce que nous savons de la longue durée des communautés humaines.
Si Lascaux 1 était un dépôt de déchets nucléaires, saurions-nous le lire encore alors que nous avons perdu la lecture des signes, de l'ithyphallique du puits aux petits chevaux ventrus galopant sur les bombés ?
Je n'ai vraiment « personnellement rien » contre le nucléaire et j'apprécie que les autoroutes soient éclairés la nuit et que Noël s'illumine et par ici il n'y a pas de tsunami  mais je m'interroge juste sur l'enfouissement de ces déchets.
Leur demi-vie, période correspondant à une diminution de leur radioactivité de moitié, est ainsi celle qui nous sépare du Lascaux originel pour le Plutonium 239.
C'est ici que le Théâtre de la Démesure s'avance en proposant une investigation des dispositifs de mémoire.

Traverser le temps : par quelle langue, quels mythes, quel théâtre ?


De quelle mémoire ce théâtre est-il notre présent ?
Pas très compliqué : la langue évolue et bouge (essayez de lire Montaigne dans le texte), Aristote c'est du grec ancien perdu pour la plupart d’entre nous et Daech s'est établi là ou était née notre brillante civilisation de l'écriture. Quant aux hiéroglyphes, leur signification, leur langage se sont totalement perdus à partir du Moyen-Age, ruines illisibles et insensées durant plus de 10 siècles, jusqu’à ce que Champollion collapse sur la pierre de Rosette.
Le maintien d'une mémoire du Risque est donc un

12 juin 2017

La mixité dans le leadership : vecteur de performance et d’accomplissement pour les jeunes générations ?

La grande question stratégique (RH et prospective) aujourd'hui est celle du "nous " : qu'est-ce qui nous tient et nous anime en tant que communauté de projets ? L'enjeu est celui d'une intelligence collective qui repose sur la collaboration entre des individus irréductiblement, vertigineusement, différents. Parmi ces différences, l'une essentielle tient aux polarités hommes / femmes.

Notre contribution en tant que consultants, coachs, consiste donc à poser des repères de différenciation dans des situations telles que celle du risque, de la représentation ou de la valeur ( donc la rémunération par exemple ). Nous n'en sommes plus à la déploration des rapports de force même si des situations d'humiliation ou de discrimination subsistent mais plutôt à la manière dont le management et les stratégies RH peuvent s'appuyer sur ces moments de différence pour élaborer de la performance collective.

C'est le sujet de ma contribution (écrite à quatre mains avec Axelle Lofficial) à l'ouvrage publié par les Éditions Management et Société  "Réinventer le leadership".
Cette contribution "experte" questionne  "la mixité dans le leadership comme vecteur de performance et d’accomplissement pour les jeunes générations ». En voici un extrait :
 « Le leadership contemporain : une voie, pas un savoir"
 A la manière d'un art martial, l’exercice du leadership est constamment et humblement renouvelé. Lucidité sur soi, intuition de l'autre, vision stratégique, soutenir la communauté de projet sont les leviers de cette légitimité. Cela suppose une vigilance sur soi, le questionnement collaboratif, l'écoute de celui qui n'a pas tous les pouvoirs (subordonnés, autres cultures, clients, fournisseurs, etc.) et la loyauté confrontante envers les partenaires de pouvoir (présidence, hiérarchie, concurrents, etc..). Le leadership n'est pas une affaire individuelle mais un registre éthique et performant de la communauté en actes. Dans le moment historique qui est le nôtre, cet horizon de la communauté de projet se fait sous contrainte sociale : suspicion d’intellectualisme, incertitude des prospectives, feuilletage des cultures, introduction des non-humains dans l’espace de décision (intelligence artificielle, robotisation, agents virtuels de communication) ou encore prise en compte de l’empreinte environnementale mais il n’y a pas d’autre chemin pour garantir nos avantages concurrentiels et il incombe au leader d’interpréter le complexe. L'espace de progression se gagne sur le terrain de la communication managériale et dans des séminaires dans lesquels la parole circule et les représentations s'interrogent. Alors le leadership, dans le moment historique qui est le notre devient ce qu'il doit être : un art ».

En lire plus :  Réinventer le leadership - Ed. EMS - 34 €
 

17 mai 2017

Nouvelle Route de la soie, quand les chinois jouent au Go !

Le forum OBOR du 14 mai à Pékin

Xi Jiping président chinois, ouvre un forum international comprenant près de 30 chefs d’état et une centaine de représentants étrangers autour du lancement de la « Nouvelle Route de la Soie ». Aboutissement d’une politique amorcée lors de son investiture en 2013. Il s’agit d’économie, d’industrie mais surtout de stratégie. Elle semble ruineuse et illisible alors qu’elle sera rentable, hégémonique et explicite. Il s’agit d’une partie de go.
Les engagements les plus visibles (car il en est évidemment de plus secrets, bilatéraux) consistent en un fond de 40 milliards de dollars abondés par la banque centrale chinoise et des investissements de centaines de milliards d'euros au Pakistan, en Afrique, en Grèce alors que le monde (occidental) s'interroge sur la signification-même de OBOR « One belt, one road » c'est-à-dire «une ceinture, une route ». Nous avançons ici que tout simplement les Chinois poursuivent une gigantesque partie de go (wéiki en chinois, Baduk en coréen) avec déjà plusieurs coups d’avance.

Une partie de go 

Le but de ce jeu, d’origine chinoise mais répandu par les Japonais, n'est pas d'avancer en ligne, en opposition frontale ou massive mais de développer des territoires à partir de positions pivots. Tels une forêt de bambous géants dont les pionniers ne se suivent pas en ligne mais s'avancent très loin tandis que des vagues suivantes remplissent le terrain. La partie se déroule dans l’espace mais surtout dans le temps, des positions éparpillées s’avérant stratégiquement constitutives au fil du temps. Ici même chose : c'est la signification de belt : un contour final, souple et puissant tel l'échine d'un dragon ou d'un tigre. Les Européens jouent au niveau de l'Europe.  Les Américains ne savent plus comment s'y prendre pour contenir et tenir. C'est donc le bon moment pour les Chinois de jouer leur partition. Le monde est leur plateau de jeu, leur Goban.

Stratégies fatales

A terme l'axe Athènes-Venise-Rotterdam coupe en deux l’espace européen. L’Europe est pénétrée par les ports, aujourd’hui fragiles donc vulnérables au « partenariat » chinois. Les Russes sont juste associés mais stratégiquement dépassés : ils sont offensifs, déstabilisants, assument la violence politique mais n'ont pas les moyens et la stratégie de la longue durée. L’Europe, depuis les décolonisations, n’ose plus œuvrer au niveau mondial, notamment en Afrique où ses pudeurs politiques laissent la place à l’économie chinoise et à l’américanisation des valeurs. Elle se cantonne donc au territoire à peu près européen sans bien savoir où cet espace commence et où il finit, suivant qu’elle privilégie fantasme d’ouverture universelle ou affirmation d’un patrimoine européen. Américains, Japonais, Australiens, chacun ayant moyens et prétention de puissance commerciale sont tenus à l’écart du projet OBOR C’est donc le moment opportun pour la Chine, dans un monde multipolaire et mondialisé qu’elle s’efforce d’organiser à son profit d’empire, une domination économique et structurelle, laissant intacts les régimes politiques et religieux quel qu’ils soient, à la différence des considérations européennes et américaines du XXeme siècle. La maîtrise des flux et des ressources sous  l'égide du vieux thème mythique de la Route de la Soie,  préfigure une mise en coupe réglée des matières premières, une maîtrise des transports, fluvial, maritime et ferroviaire, la suprématie des balances commerciales et l’édification du Yuan comme monnaie d’échange dans toute cette zone, c'est-à-dire le monde, avec probablement à terme un adossement du Yuan à l’or physique, dont Chinois et Indiens détiennent aujourd’hui la plus grande part.
Voilà le monde du XXIe siècle qu'ils s'apprêtent à bâtir. Nous devons apprendre à jouer au go si nous voulons déjouer cette suprématie.

La réponse stratégique de type go 

1. Contenir l’avancée chinoise par des contrôles et contraintes puissantes : au go, on ne peut faire disparaître l’adversaire mais on peut le contenir.
2. Renforcer nos points faibles. Ne pas laisser désarrimer Le Pirée à l’Europe. Les Chinois le veulent, nous devons y investir.

Ces réponses seront respectées et appréciées par les Chinois. L’innocence sera méprisée.

6 mars 2017

Jouer dans le mille, Rockin’1000, une communauté effusive

Faire communauté, partager un « nous », voilà la grande affaire du siècle !

L’évidence du "nous" au XXe siècle (« nous sommes : les réprouvés, les avant-garde, les révolutionnaires, les bons, les meilleurs, les plus beaux, les savants, les plus forts, les plus éclairés, les pieux, les gagnants », etc. au choix) s’est évanouie avec les identités en archipel, l’humain augmenté et nos innombrables avatars et pseudos.
De temps à autre surgit, au gré d’une catastrophe (Fukushima) ou d’un attentat (le 13 nov) le ré-enracinement dans une communauté de solidarité mais ça se ré-effrite bientôt et prend difficilement politiquement

Pourtant de temps à autre nous parviennent d’heureuses nouvelles de communautés ludiques et ponctuelles qui se savent politiquement révolutionnaires.
Ainsi l’été dernier, à Cesano dans une petite bourgade perdue d’Italie, « où rien jamais ne se passe » (dixit l’organisateur Fabio Zaffagnini) et dans un pays où les initiatives collectives sont réputées difficiles ou dévoyées, Rockin’1000, a pour la 3eme édition consécutive, rassemblé dans le stade local plus de 1000 musiciens, tous amateurs, tous bénévoles pour tout simplement jouer ensemble (oui : 100 batteurs à l’unisson rythmique, 150 guitaristes solo, 100 bassistes, chanteurs, 14 cornemuses, etc.) quelques morceaux cultes de pop et de rock.
Chacun s’entraîne de son côté, sur le mode d’un flash mob, puis le jour venu, s’installe au stade pour jouer ce morceau, soutenus par un chef d’orchestre qui agence l’ensemble.
Et ça marche, les musiciens sont en transe fusionnelle, note par note, pédale wahwah et descentes de riffs, solos de batterie, chœurs extatiques, le public exulte, ce sont leurs copains et leurs chansons. Fierté, don et sentiment d’avoir collectivement vécu une utopie contemporaine.
Comme un début de révolution positive. L’anonyme est sur scène, la star est millier, l’ego extatique dans l’identification fusionnelle à une musique populairement culte. Une prometteuse énergie pour se réveiller, affronter, célébrer.



Ensemble au Nirvana