2 octobre 2024

Everest, Inoxtag - Le temps retrouvé

Kaizen : Inoxtag a plié le game et on vous explique comment - Afffect Media
Pas à pas, la montagne va lui apprendre le vertigineux présent

 

Un petit mot  qui s'ajoute aux 35 millions de visionneurs du film d’Inoxtag en quinze jours. Ce jeune homme de 22 ans, assuré de son million de followers se fixe en 2020 un nouvel objectif de « ouf, frère, bro »  : grimper l’Everest dans un an.
Le récit-film qu’il en tire est passionnant : le jeune homme pressé, avec sa vie exténuée de malbouffe , de mal dormir, de mal vivre, d'instantanéité du temps s’engage à (essayer de) gravir la plus haute montagne émergée , l’icône des records : l’Everest.
Et, bien sûr, c'est très autocentré (c’est un youtuber) en go pro, en selfie, suivi par d’acrobatiques cadreurs et des drones asservis et il fait le récit, souvent en live, de ses efforts, préparations, enthousiasmes mais aussi de ses doutes, appréhensions et grandes peurs.
Et le voici, dans ce temps luxueux d’une année -une éternité au regard de ses journées de boulimie on line- écouter son corps, choisir des compagnons coachs , guides, sherpas. Il bascule peu à peu dans la transmission humaine, de main à main sur arrière plan de nature.
L’Everest qui n’était qu’une image (la très belle montagne du générique d'ouverture n’était pas l’Everest mais le Ama Dablam, un autre sommet népalais ) devient peu à peu une présence mythique qui s’approche, se dérobe et se concilie.

 

L'humilité et le respect de la montagne

Plus même que l'effort consenti , soudain le tempo s’étire : lent GR 20 des dénivelés radicaux, aubes glaciales des sommets alpins, longues marches d’approche himalayennes.
L’arrivée à Kathmandu avec ses vaches errantes, son trafic chaotique tout ça le ravit, en réaction live in the box.
Puis ce sont de longues marches, découvertes du haut pays, sourire, réserve, humilité des guides et sherpas. Doigts perdus, engelures et dizaine d'ascensions parce que c'est ainsi qu'on fait vivre sa famille.
Inoxtag descend sur terre en l’arpentant , en perdant du temps, celui de l'attente et des fenêtres météo, réduit presque complètement ses posts et messages. Et découvre la folie, le business des expéditions. Encombrements sur les cordes fixes, oxygène dopante qu’on se vole, montagnes de déchets.
Chaleur des rencontres dans les tentes , pisses nocturnes et diarrhées monstrueuses , Covid insidieux, personne n’échappe aux vicissitudes de l’altitude des confins.
Peu à peu , Inoxtag s’humanise, rit moins , devient chaleureux. Il comprend qu’il s’agit moins d’un exploit que d’une quête.
Il y a un pouvoir de la montagne : un des deniers espaces de liberté où la responsabilité peut devenir intime.
 

 Décider par soi-même

On y va, on n’y va pas ?
On peut, on ne peut pas?
La météo ouvre quelques portes mais au final c’est le grimpeur qui personnellement décide.
La plus belle réplique du film, celle du compagnon skieur, « arrête avec ta gorge, arrête de t’écouter. On va faire ce qu’on sait faire : avancer d’un pas puis l’autre. Et continuer. »
Immensités, verticales interminables et crevasses gigantesques. Avalanches et chutes de sérac aléatoires où chacun, expérimenté ou débutant est soumis au même sésame de la montagne. Présence de la mort, accidents et cadavres anciens.
Dans les épreuves, on se synchronise souvent avec des proches. Ils nous accompagnent dans les moments de dépassement et ils sont parfois destinataires de l’ordalie.
Inoxtag étant peut-être trop jeune pour impliquer ses enfants et un peu solo pour se raccorder à une âme soeur, celle des ultimes messages de Rob hall ou Scott Fisher lorsqu'ils approchent de leur fin perdus dans la zone des 8000, c’est pour lui une reconnexion à ses parents qui va se mythifier intimement au cours de sa quête.
Quête finit par la ferveur et le silence..

Bien sûr tout est critiquable et critiqué, relatif et ambigu, grassement produit mais le récit , la découverte des espaces et cultures du monde lointains, la question du risque ultime, la mutation du bonhomme sont indéniables et touchants. Le télescopage entre le virtuel et la réalité, entre l'ego et le collectif, entre l'hyper-individu et son environnement s'y manifestent.
Les drapeaux de prière qui apparaissent de plus en plus dans le cadre ont éclairé l’âme du youtuber.
Lha Gyal lo !

Sur Youtube : Kaizen, d'Inoxtag https://www.youtube.com/watch?v=wrFsapf0Enk



Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire

Merci pour votre commentaire !