Faire communauté, partager un
« nous », voilà la grande affaire du siècle !
L’évidence
du "nous" au XXe siècle (« nous sommes : les
réprouvés, les avant-garde, les révolutionnaires, les bons, les
meilleurs, les plus beaux, les savants, les plus forts, les plus
éclairés, les pieux, les gagnants », etc. au choix) s’est
évanouie avec les identités en archipel, l’humain augmenté et
nos innombrables avatars et pseudos.
De temps à autre surgit, au gré d’une
catastrophe (Fukushima) ou d’un attentat (le 13 nov) le ré-enracinement
dans une communauté de solidarité mais ça se ré-effrite bientôt
et prend difficilement politiquement
Pourtant de temps à autre nous
parviennent d’heureuses nouvelles de communautés ludiques et
ponctuelles qui se savent politiquement révolutionnaires.
Ainsi l’été dernier, à Cesano dans
une petite bourgade perdue d’Italie, « où rien jamais ne se
passe » (dixit l’organisateur Fabio Zaffagnini) et dans un
pays où les initiatives collectives sont réputées difficiles ou dévoyées,
Rockin’1000, a pour la 3eme édition consécutive,
rassemblé dans le stade local plus de 1000 musiciens, tous amateurs,
tous bénévoles pour tout simplement jouer ensemble (oui : 100
batteurs à l’unisson rythmique, 150 guitaristes solo, 100
bassistes, chanteurs, 14 cornemuses, etc.) quelques morceaux cultes
de pop et de rock.
Chacun s’entraîne de son côté, sur
le mode d’un flash mob, puis le jour venu, s’installe au stade
pour jouer ce morceau, soutenus par un chef d’orchestre qui agence
l’ensemble.
Et ça marche, les musiciens sont en
transe fusionnelle, note par note, pédale wahwah et descentes de
riffs, solos de batterie, chœurs extatiques, le public exulte, ce
sont leurs copains et leurs chansons. Fierté, don et sentiment
d’avoir collectivement vécu une utopie contemporaine.
Comme un
début de révolution positive. L’anonyme est sur scène, la star
est millier, l’ego extatique dans l’identification fusionnelle à
une musique populairement culte. Une prometteuse énergie pour se
réveiller, affronter, célébrer.
Ensemble au Nirvana