7 mars 2014

Réseaux de femmes, une ressource fraîche et vitale de l’intelligence collective en entreprise

Quelles sont les conditions de réussite d’un réseau de femmes ? Quels en sont les thèmes porteurs ? Qu’est-ce qui marche et qu’est-ce qui ne marche pas ? Entraide et viabilité d’un réseau en temps de crise ? 
 Tels ont été quelques-uns des multiples thèmes abordés jeudi 6 mars dernier à l’accueillante maison ETP de la rue Cortambert à Paris, autour d’un délicieux buffet aimablement et plaisamment réalisé par un ingénieur TP qui se délasse aux fourneaux après ses journées de direction. 

Une communication managériale d’inspiration féminine ? 

Invité très minoritaire (10% d’hommes) à cette rencontre initiée par le Club ETP au Féminin (rappelez-vous que j’étais membre du jury des Trophées 2013 ETP au Féminin qui a lieu tous les 2 ans), j’y ai immédiatement apprécié l’organisation parfaite et fluide, les contenus précis mais également 3 spécificités de communication qui colorent ce que j’identifierais volontiers du style managérial féminin: 
1. partage de ressources, exposition personnelle (confidences, moments vécus), et non prétention à la perfection. L’attitude générale des oratrices était de partager, d’aider celles qui s’interrogeaient à passer à l’acte. L’éthique est altruiste : donner pour pouvoir recevoir éventuellement. Faire le pari du don. 
2. l’implication n’est pas abstraite mais s’enracine à chaque fois dans une histoire personnelle, une construction professionnelle qui progressivement a intégré la dimension Hommes/Femmes dans le management,
3. là où beaucoup d’hommes responsables bétonneraient en public sur le succès sans failles de leurs dispositifs, la plupart des participantes de cette table ronde ont inclus la présentation de « défaillances » dans leurs dispositifs : jamais gagnés abstraitement, toujours des processus en humilité. 

Que se passe-t-il entre femmes ? 

Les participantes témoignaient pour des réseaux de grands groupes (Bouygues Tel, Cercle des femmes de l’immobilier, Women Exchange PSA) mais aussi pour des réseaux associant de petites entreprises du BTP, par lesquels se peut rompre l’isolement des femmes managers de petites structures. Ces réseaux accueillent des participantes qui « donnent » : du temps, de la ressource (cotisations non symboliques), de la collaboration d’idées, de la mutualisation (info, entraide...). La démarche est systématiquement inclusive, elle recouvre de l’expertise autant que
de la confidence (déconstruire les sentiments de culpabilité de la conciliation carrière/famille, contextualiser le biais du genre dans la culture d’un service, partager et proposer des idées nouvelles, etc.). Il y a des moments de culture et de bien-être mais aussi des réflexions sur les « talent review », sur les entretiens d’évaluation, sur les moyens d’accès au board. Une ressource forte réside également dans la rencontre avec d’autres réseaux féminins d’entreprise ainsi qu’en perspective avec une réflexion sur les initiatives féminines dans d’autres cultures. 

 Appuis et influences, temps d’ouverture à la mixité 

Ces éléments recoupent ma propre expérience (chez Total ou Bosch par exemple) : le développement d’un réseau nécessite qu’il soit stratégiquement soutenu. Les réseaux qui fonctionnent bien ont en général bénéficié d’un soutien ostensible d’un DG, soit parce qu’il veut renforcer activement la mixité, soit parce que sa propre biographie le rend sensible à la discrimination (ancien faisant le bilan de sa carrière, manager ayant des jeunes filles l’alertant sur quelques résistances à la parité, etc.). 
Les temps de l’entre-soi y sont absolument nécessaires car il s’agit de populations de fait minoritaires et dont souvent la spécificité est souvent perçue comme un « non-sujet » par l’organisation de travail. Cet « entre-soi » apporte de multiples avantages : tempo de la parole, conditions de la confidence, partage de micro-blessures et de rires, prendre le temps de ne pas penser solutions, la construction d’une éthique de la parole et des comportements, etc. 
D’autre part, ce qui s’y invente d’un management qui soutient et accueille les femmes dessine de fait un management collaboratif, inclusif qui s’impose aujourd’hui comme un paradigme contemporain. De ce point de vue, chacun, homme ou femme y trouve ressource et déploiement, dans l’exercice de cette intelligence collective qui est l’avantage concurrentiel décisif. Pour que cela opère et diffuse au-delà de la « cause des femmes », des temps d’ouverture qui accueillent des hommes sont nécessaires dans le principe du réseau car l’enjeu final n’est pas de travailler séparément mais en mixité. Cette ouverture doit se mettre en scène avec vigilance car ouvrir c’est aussi prendre le risque de retrouver d’anciens schémas « innocents » de la domination.

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire

Merci pour votre commentaire !